Parfois on peut passer à côté d'un petit génie politique sans avoir eu le flair de l'avoir repéré pour miser sur lui. Nez bouché, anosmie, un fort Mistral et c'est trop tard ! Envolé ! Car quand il sera sur le trône sublime, il vous écrabouillera du bout de ses Louboutin gourmette et vous fera payer cher votre manque d'odorat synonyme de 'loser' enrhumé. On imagine aisément dans ce rôle un certain Geoffroy Didier qui buzze actuellement sur tous les plateaux télés. Sciences-Po, ESSEC, universités de Columbia et Harvard, ce beau jeune loup aux dents longues depuis 37 ans, secrétaire national de l'UMP (et ce n'est pas un canular, en charge de la protection des riverains et de la lutte contre les nuisances aéroportuaires), une morgue superbe, déjà grand technicien du langage et de la manipulation, tête à claques pour certains mais tête bien remplie d'une efficace rhétorique politique, bref, une personnalité de droite qui va vite s'imposer. Objectivement, on ne peut que reconnaître le charisme de ce potentiel César venimeux.
Pendant ce temps, pépère ou mé-maire comme vous voulez, Maryse Joissains, est en pleine campagne pour la prochaine municipale. A part le fiasco actuel des bus aixois, tout roule pour elle. L'opposition dort toujours, et, pendant qu'Alexandre Medvedowsky tweete, Maryse visite, et re-visite, et re-re-visite les quartiers aixois, bref, la bête politique qui ne s'est jamais endormie assure. Pour contrer les attaques qui inondent le net sur elle, un fervent guerrier, probablement désintéressé, s'est engagé à la défendre et nous invite sur son site à "paver le chemin de nos espoirs et d'autant de pierres de liberté". On remercie l'altruisme éclairé d'Alexandre-Guillaume Tollinchi, 25 ans. Who ?
Quand on se penche sur son CV, on est un peu désorienté. Fils d'avoué d'une étude familiale rue Espariat à Aix, Alexandre-Guillaume Tollinchi n'a pas compris que l'expérience politique passe pendant quelques années par l'humilité, l'observation sagace et une rigueur à toute épreuve. Né à Aix dans une famille corse d'avocats, il va et vient d'Aix en Corse et de Corse à Paris. Pas simple de trouver une bio construite. Ses études sont floues, Lycée Fesch à Ajaccio, ensuite le CNED et puis une université. Il y a bien un PDF, certainement écrit par lui-même, très étonnant voire très cocasse.
On y apprend qu'en 2000 (il a environ 13 ans), il est "élu conseiller municipal RPR des Jeunes à Aix-en-Provence", (bizarre, il est interdit d'afficher une étiquette au conseil municipal des jeunes). En 2002 (il a donc 15 ans, il "démissionne de ses 'responsabilités locales' et entre en politique nationale à Paris" (!). Toujours la même année, il ne soutient pas Alain Juppé à la présidence de l'UMP mais "le candidat sarkoziste et proche de Charles Pasqua, Rachid Kaci". En 2003, il est encore "élu" conseiller de la jeunesse de Paris (le mot "élu" est usurpé c'est une structure consultative). Et, en 2006, il est "réélu à l'unanimité conseiller national des jeunes UMP". Je passe vite sur les redondances des autres nombreuses "fonctions" politiques et m'arrête sur un "déplacement officiel en Guadeloupe dans le cadre de son mandat avec la mairie de Paris" ! Déplacement officiel ? Mandaté par qui ? La reine Elizabeth, les chefs d'états sont en déplacements officiels, donc à cette époque, Bertrand Delanoë aurait dit à cet adolescent "Allez, petit, va faire un tour officiellement en Guadeloupe en mon nom !" Pétage de plombs de Delanoë ou bien mythomanie épistolaire ?
Pour ceux qui sont intéressés par l'astrologie, on peut découvrir par un lien sur son site son thème astral réalisé par deux astrologues : verseau ascendant balance. Pas terrible. Scorpion ascendant scorpion (Villepin) aurait été bien plus ostentatoirement publiable. Son admiration pour Berlusconi (son pseudo sur Twitter est forzatollinchi, par imitation de "Forza italia", ancien nom du parti du "Cavaliere"), et pour Georges Frêche, ne servira pas son avenir politique s'il pense en avoir un. Faire également des condoléances en tant que personnalité se prétendant influente est assez pathétique dans la démarche. Exemples :
- La famille Ricard à la suite du décès du big boss, il publie le 18 août dernier (jour de ma fête) : "il nous laisse nous Français et plus encore dans les Bouches-du-Rhône, orphelins", (il représente donc l'ensemble des Français).
- Pour la disparition de Franck Alamo : "suite au décès du chanteur Franck Alamo, je tiens à exprimer à sa famille, ses proches et amis mes sincères condoléances. Interprète de "ma biche", Franck Alamo a chanté l'amour toute sa vie".
- Le décès du sulfureux Georges Frêche, il publie un long cri admiratif bien puéril, carrément juvénile. Il cite Sénèque, puis dérive en Chine "Les Chinois que Georges Frêche vénérait particulièrement disent que "lorsque mille personnes prennent la route il en faut une pour prendre la tête", en Egypte, "Comme un ultime pied de nez l'ouvrier qu'il était vient d'être sacré pharaon", "Toutankhamon de la vie politique française", revient en France, "le roi est mort vive le roi !".
Fureter un peu partout pour se faire connaître et tenter n'importe quoi n'importe comment n'est pas efficace pour enraciner une réputation. En 2010, il décide de tenter un "rapprochement entre la droite d'argent et la mouvance nationaliste" en Corse. "Il fonde l'Union de la droite Corse dont il sera le seul militant avant de se rapprocher de Silvio Berlusconi dont il se proclamera le représentant en Corse", dixit le site Patria nostra qui, en août 2012, le découpera en fines tranches de figatelli. Au-dessus de l'article apparaît AGT, sans âge, en pose clonique berlusconienne… Sur son site, onglet "ce pour quoi il plaide", on le voit assis derrière un ostentatoire bureau napoléonien (paternel je suppose). C'est une grande joie de découvrir le long fleuve de ses perspectives politiques. On peut aussi admirer le seul commentaire laissé par un adorateur :
"Cher Alexandre-Guillaume, vous avez le charisme d'un grand dirigeant. A n'en pas douter, vous embrasserez un destin national. Continuez à défendre vos convictions et à vous battre pour le triomphe de la liberté et de la Corse."
Capture d'écran sur le blog Patria nostra (avec leur accord)
Le lien du PDF en support du 4ème paragraphe a été vidé de sa substance par M. Tollinchi ou par son "Equipe". Constaté le 22 novembre 2012. En avait-il honte ?