La grande caravane de campagne du cirque Joissains est en route. Elle commence son tour de France pour tenter de conserver la plus haute place du podium, la mairie d'Aix-en-Provence. L'équipe en question possède une arme redoutable que ses futurs adversaires (qui dorment encore) n'ont pas dans leur programme et qu'ils n'oseraient jamais exploiter, leur image ! Le but, se servir de l'histoire soi-disant extraordinaire et tragique du couple Joissains pour donner à manger aux Français affamés et en proie à tout ce qui touche le people. Et là, le contenu est solide.
Les tragédies d'une vie sont dans toutes les familles. L'engagement politique, la mort, la maladie font partie d'un tracé banal et logique que n'importe qui peut vivre et qui n'a rien d'exceptionnel. Maryse Joissains, en déroute vaseuse à la suite des législatives perdues, de son impopularité toujours grandissante, n'a plus d'autres cartouches à distribuer que celle-ci : sa vie. Cette cartouche, elle la connaît bien. Elle l'a utilisée à de nombreuses reprises et n'a eu qu'à piocher dans son parcours personnel. La séduction ou la manipulation, car c'est la même chose, est une affaire de contact direct avec les personnes. Il faut 'rentrer' dans les nombreux citoyens indécis et faire vibrer la corde émotionnelle. Comme disait Georges Frêche, "peu importe ce que tu as fait, les ponts que tu as construits, les logements sociaux érigés. Ce qui paie, c'est les boîtes de chocolat distribuées dans les maisons de retraites visitées". Rajoutons les poignées de main appuyées d'une phrase personnelle que le citoyen, flatté, va ramener chez lui et diffuser, ça c'est aussi de la politique. La politique, c'est surtout un job de communication.
Maryse Joissains sait qu'elle peut perdre dès le premier tour la prochaine municipale. Trop de tapage, trop d'esclandres, trop de tout ont lassé les Aixois. Et les Aixois ont changé. Une vente sur trois est faite à un Parisien et le marché immobilier d'Aix est plus que florissant. La droite traditionnelle aixoise n'a jamais reconnu cette femme qui en faisait des tonnes et que l'Assemblée nationale surnommait "la poissonnière". On vote donc pour le parti mais jusqu'à un certain seuil, l'étoile filante sarkozienne l'a prouvé. Si on suit le schéma de la dernière présidentielle, courante reproduction, les Joissains seront poussés hors de la mairie dès le premier tour si, et uniquement si, un profil solide se présente comme, par exemple, Christian Kert, UMP, et que la gauche choisisse enfin un candidat potentiel.
Pour Maryse Joissains, faire campagne localement, pour le moment, c'est un risque à prendre. Trop tôt c'est trop tôt, trop tard c'est trop tard. Pas simple de choisir le bon moment mais, en revanche, il est facile de manipuler les esprits sur le plan national quelques mois avant le déferlement des militants sur les marchés et dans les quartiers. Priorité, mettre en place le canevas du Net et modeler un profil qui va impacter. Il y a toujours des journalistes compatissants ou parfois des juges mus par une soudaine clémence hors du champ pénal. J'ai deux beaux exemples, Christine Clerc et Philippe Bilger.
Christine Clerc vient de publier sur le site de Marianne2 un article "La Madame Sans-Gêne d'Aix-en-Provence", ou plutôt une nouvelle, puant le parisianisme, et décrivant en des tons zoliens le parcours de la "pétroleuse célèbre", "la dameu d'Aix". Elle ne s'attache qu'aux couleurs locales caricaturales, glisse très vite sur le fond politique et les nombreuses casseroles que traîne le pseudo clan Joissains. La journaliste a visiblement des sympathies pour elle puisqu'elle l'accompagnait "à l'arrière de sa voiture qui nous ramenait de Marseille après un débat télévisé"… Elle dépeint une femme somme toute attachante, un personnage de roman haut en couleurs et en gouaille vulgaire sans jamais rentrer dans le vif du sujet qui nous concerne, nous Aixois, c'est-à-dire sa politique, son bilan. Et le texte n'en finit pas. Il est long et pousse à la lecture en diagonale.
Une première, son chauffeur est à l'honneur ! Très importante information pour les Aixois, le chauffeur de Maryse Joissains certainement voulue par elle d'ailleurs car la journaliste en met une belle couche : "Omar est célèbre : on vient le voir quand on a un message à faire passer à la maire". Et Maryse Joissains de remettre les pendules à l'heure au cas où sa vie sexuelle nous intéresserait. "Il n'est pas mon amant, il est plus que cela : un ami fidèle". Plutôt que l'alcôve, c'est le contrat qui m'intéresse. Curieuse je suis. J'aimerais bien connaître le salaire de cet Omar, à quel taux et pour quelle fonction il est payé ? Et surtout à quel titre ? Est-ce légal de jouer le rôle d'un élu alors qu'il ne l'est pas ? On doit donc passer par le chauffeur de Maryse Joissains pour lui faire remettre un message ?
Christine Clerc a le mors people en bouche. Elle en bave d'aisance. Maintenant, on pénètre dans la chambre conjugale. Elle, Maryse, ne "supporte plus" son mari, Alain, d'avec qui elle n'est pas divorcée car chez elle "cela ne se fait pas". Mais il habite l'étage au-dessous du sien. "Mon mari a deux enfants hors mariage", tiens donc ? Maryse Joissains divulgue cette info très privée alors que son époux a voulu porter plainte contre moi pour la parution de mon article "Les ombres d'Alain Joissains" en mai 2008 ! Etrange et suspect. Christine Clerc a eu donc le feu vert…
Philippe Bilger, lui, fait à peu près la même chose que Christine Clerc dans son article paru sur son blog. Magistrat reconnu, à l'histoire familiale lui aussi tragique, de droite, il tombe dans un pathos pitoyable volant à la défense de l'ex-députée encore maire. Subjugué par l'article de Christine Clerc donc par la vie de Maryse Joissains, "Je ne m'attendais pas à une telle saga", il en reprend les lignes fortes et fait une description similaire où le chauffeur y est encore ! Bilger parle de "ses malheurs et ses remontées" et d'"une femme à l'égard de laquelle, pour tout ce qu'elle a vécu et subi, il m'est impossible de ne pas éprouver une sorte de respect instinctif" ! Comment un juge peut-il passer par une appréciation instinctive ?
Bilger, qu'il le veuille ou pas, fait l'apologie de Maryse Joissains, la sert, et lui apporte son soutien. Force est de constater que sa position de haut magistrat peut influencer bon nombre de lecteurs, à moins que, emporté par une émotion refoulée, il se reconnaisse dans le parcours de M.J. mais là, c'est de l'ordre de la psychanalyse et non de la Justice.
Le but de Clerc et de Bilger est d'apitoyer la grande masse sensible par un blanchiment d'image mettant uniquement en avant des événements qui ne peuvent relever que de la vie privée. Ils servent de caution morale. Quant à la journaliste, elle sait très bien ce qu'elle fait. Sa présentation est orientée pour détourner le lecteur du rationnel vers le larmoyant. Pleurez braves gens !
Et une dernière rectification, madame Clerc. Vous écrivez, en parlant d'Alain Joissains et au sujet de cette procédure en cours : "Dans l'ombre, depuis que le tribunal administratif de Marseille a contesté son contrat avec la municipalité pour cause de salaire excessif, il reste son conseiller. Et elle continue à le défendre bec et ongles. "On n'a pas saisi la Cour européenne parce qu'on n'avait pas les sous. Mais là, je vais réattaquer !"
C'est faux ! Il n'y a aucun lien entre le statut d'Alain Joissains et la décision du TA car il était atteint de toute façon par la limite d'âge. Et Maryse Joissains ment car il serait étonnant qu'elle puisse saisir la Cour européenne qui ne juge pas le droit français de la fonction publique d'autant que le Conseil d'Etat n'a toujours pas rendu sa décision finale.
Bonnes rectifications.
Lien de l'article de Christine Clerc Marianne2
Lien de l'article du blog du juge Philippe Bilger